TIM CHESTER
Le sujet de l’humilité pourrait sembler déplacé dans une discussion de la mission intégrale et du développement chrétien. Pourtant, selon Michée 6.8, marcher humblement devant le Seigneur est une exigence de Dieu autant que rechercher la justice et manifester de la miséricorde. A plusieurs reprises, Dieu a mis son peuple en garde contre le péché d’orgueil. L’humilité est proche du cœur de Dieu. Dieu estime les humbles et fait plier les orgueilleux.
L’humilité est importante parce l’orgueil nous est si naturel. Si vous voulez faire pousser de l’herbe, vous n’avez rien à faire, mais si vous voulez faire pousser du riz, vous devez le cultiver. C’est la même chose avec l’orgueil et l’humilité. L’orgueil se développe naturellement, mais l’humilité doit être cultivée. Mais cela ne veut pas dire adopter certaines attitudes extérieures. L’humilité ne peut pas être réduite à des actions extérieures – c’est l’environnement intérieur du cœur. C’est une caractéristique d’une personne dont la sécurité est en Dieu. Et marcher humblement, cela concerne aussi bien la vie en commun que la marche personnelle. En tant qu’organisations de développement, nous pouvons trop facilement souhaiter promouvoir nos succès et trouver difficile de louer les réalisations des autres.
Je souhaite souligner de plusieurs façons comment l’humilité a une importance cruciale pour la mission intégrale.
1. L’humilité et les marginalisés
Nous regardons les pauvres de nombreuses façons. Nous pouvons les voir comme des statistiques, comme des objets de charité ou comme des victimes de l’injustice. Mais l’humilité vraie voit les pauvres comme ceux qui représentent Dieu. Nous pouvons trop facilement ressentir une préoccupation professionnelle à l’égard des pauvres de 9 heures à 17 heures mais ensuite ne plus rien avoir à faire avec eux. Mère Teresa a dit que dans chaque pied qu’elle soignait, elle voyait le pied de Jésus.
On raconte l’histoire d’un homme qui est mort et est allé au ciel. A sa grande surprise, il a découvert qu’il y avait une banque au ciel. Mais, quand il s’y est rendu pour effectuer un retrait, on lui a dit qu’il n’y avait pas de fonds sur son compte. Comment, a-t-il demandé, pourrait-il avoir déposé des fonds alors qu’il n’y avait pas d’agence sur terre ? « N’avez-vous pas lu la parole de Jésus ? » a répondu l’employé. « Donnez aux pauvres et vous recevrez des trésors au ciel. Les pauvres sont les représentants de la banque du ciel. » Alors qu’il réfléchissait à ces mots, un agent de développement est arrivé pour faire son premier retrait, mais lui aussi découvrit qu’il n’avait pas de fonds. « Vous avez déposé beaucoup d’argent en travaillant avec les pauvres, » a expliqué l’employé de banque, « mais rien dans cet argent n’était à vous. »
Dieu nous donne une occasion de mieux le connaître à travers les pauvres. Nous y perdons quand nous ne lisons pas la parole de Dieu avec les pauvres du monde. Nous devons voir les pauvres, non pas comme des objets de charité, mais comme des personnes auprès de qui nous pouvons apprendre.
2. Humilité et transformation
Jésus a dit : « Bénis soient les débonnaires, car ils hériteront la terre ». Il est venu à Jérusalem sur un âne pour envoyer ce message que le monde appartient aux humbles. Nous devons nous demander si nous et nos organisations reflétons une culture d’humilité, car l’humilité est la voie d’approche du royaume. Il y a beaucoup de moyens d’exercer le pouvoir dans notre monde : par l’intermédiaire de l’argent, de la puissance et du prestige. Mais Jésus nous a enseigné que la douceur est la façon d’exercer le pouvoir dans le royaume de Dieu. L’humilité est la méthode de Dieu pour changer le monde. Celui qui règne sur le trône du ciel est l’agneau qui fut sacrifié.
Dans 2 Corinthiens 4.7, Paul dit que nous portons le trésor de Dieu dans des vases de terre. La transformation n’est possible qu’à travers les vases brisés. Nous devons trouver de la place pour les personnes brisées dans nos organisations et nos communautés. C’est alors que les gens ordinaires dans le monde diront de nous que nous sommes leur genre de communauté. Les communautés de l’espoir sont des communautés de personnes brisées.
3. Humilité et autorité
Quand il a lavé les pieds de ses disciples, Jésus nous a donné un modèle d’autorité. L’humilité est un style d’autorité dans lequel nous bâtissons le peuple que nous servons. Cela provient d’une relation avec Dieu fondée sur la sécurité. En Inde, il y a ce dicton : « Si vous êtes doux, les gens s’assiéront sur votre tête » – ils exploiteront votre humilité. Mais l’humilité est le seul modèle qui nous ait été donné par Dieu. Dans 1 Corinthiens 4, Paul dit que les apôtres sont « à la fin de la procession ». Ils sont « les balayures du monde ». Il s’agit là d’une autorité chrétienne authentique. Si vous choisissez d’être sans importance, cela ne vous met pas hors-jeu. Vous êtes là où se trouve la plus grande partie du monde. Les pauvres du monde sont considérés comme sans importance. Quand nous devenons les balayures du monde, nous devenons ce que les pauvres sont déjà.
Moïse a été appelé le plus humble des hommes. Ce fut dit cela de lui au moment où Myriam et Aaron s’opposaient à lui. Le moment où l’humilité est peut-être le plus mise à l’épreuve, c’est celui où les gens vous critiquent. La réponse de Moïse n’a pas été de riposter mais d’intercéder en leur faveur. Une autorité humble se reflète également dans la volonté de coopérer avec les autres. Trop souvent notre instinct nous pousse à concurrencer les autres, mais les disciples de l’humilité travaillent les uns avec les autres.
4. Humilité et style de vie
Le problème du style de vie n’est pas dans la théorie, mais dans sa pratique. On raconte l’histoire d’un gourou indien qui avait enseigné à ses disciples de vivre en satisfaisant uniquement les besoins fondamentaux de leur vie. Un jour, il a envoyé son meilleur disciple faire son chemin dans le monde. Le disciple ne possédait que deux pagnes, c’est-à-dire un qu’il portait pendant qu’il lavait l’autre. Et ainsi vivait ce disciple, portant chaque jour un pagne pendant qu’il lavait l’autre. Un jour, un rat mangea son pagne de rechange pendant qu’il séchait dehors. Ses voisins lui en donnèrent un autre mais il réalisa qu’il avait aussi besoin d’un chat pour éloigner le rat. Et parce que le chat avait besoin de lait, il eut une vache. Pour nourrir la vache, il obtint une petite parcelle de terre pour avoir du fourrage. Et bientôt, il recruta des gens pour cultiver la terre de façon à ne pas devoir interrompre ses méditations. Au fil du temps, il avait acquis un vaste domaine et une belle maison. Un jour son gourou vint dans le voisinage. En voyant la grande maison, il demanda à son disciple comment cela été arrivé. Le disciple répondit : « J’ai besoin de tout cela pour protéger mon pagne ».
Beaucoup d’entre nous, quand nous étions de jeunes chrétiens, nous nous sommes engagés dans des styles de vie radicaux. Mais nous avons maintenant de nombreuses justifications pour les possessions que nous avons acquises au fil du temps. Nous devons retrouver une perspective biblique à l’égard de la richesse et de l’argent. Jésus voit l’argent comme une force spirituelle. Il dit que nous devons consciemment court-circuiter son pouvoir dans notre vie. Jacques Ellul a dit que Jésus était le seul qui ait été prêt à décrire l’argent comme Mammon.
Nous devons définir des limites à la consommation. Nous, chrétiens évangéliques, avons une théologie de la création et de la distribution de la richesse, mais nous devons avoir une théologie de la consommation. Nous devons définir ce qui est suffisant. Nous devons apprendre que nous n’avons pas besoin de posséder tout. Nous devons rechercher les possibilités de partage avec les autres et de la possession de choses en commun.
L’humilité n’est pas une option pour ceux qui sont engagés dans le ministère holistique. L’humilité est la force de transformation. L’humilité est au cœur de la nature de Jésus. L’humilité est une caractéristique que Dieu veut que nous possédions tous. Jésus a dit : « Apprenez auprès de moi, parce que je suis doux et humble de cœur ».
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