Auteur : Kirsty Thompson, CBM Australie – Forum régional Asie-Pacifique du Réseau Michée
Les personnes handicapées forment-elles un groupe marginalisé ? Quelles formes de marginalisation vivent-elles, le cas échéant ? Comment répondons-nous ou contribuons à cette marginalisation ? Comment pourrions-nous mieux répondre ?
SESSION PLÉNIÈRE SUR
HANDICAP et MARGINALISATION
INTRODUCTION À LA MARGINALISATION ET AU HANDICAP
Pour commencer, je voudrais partager une histoire, l’histoire d’une jeune fille qu’une collègue a rencontrée pendant la période où elle a travaillé en Afrique occidentale alors qu’elle suivait le programme CBR. Voici son histoire :
La capitale du Niger, en Afrique occidentale, est une ville chaude et sablonneuse en plein désert.
Un matin, je manœuvrais péniblement dans le sable profond notre deux roues motrices.
Soudain, un homme mince et sec habillé d’une robe faite de fils nus, blanche, me fit signe d’arrêter.
Je m’arrêtai. Le véhicule s’enfonça profond dans le sable. Un coup de main s’avérait nécessaire pour sortir de là.
L’homme se présenta comme Ibrahim. Il me demanda de le suivre. Nous entrâmes dans une enceinte très dépouillée et poussiéreuse. Devant sa hutte, une belle jeune fille d’environ quinze ans se tenait assise sur le sable, les jambes étendues devant elle, et vêtue de guenille. Comme nous nous approchâmes, je sentis la puanteur épouvantable d’une chair en décomposition. La fille me salua chaleureusement. Son nom était Zinabou. Ibrahim son père, me montra d’énormes escarres infectées, sur les cuisses et les fesses de Zinabou. Un essaim de mouches bourdonnait autour.
Ibrahim me raconta l’histoire. Zinabou et son frère avaient creusé une fosse à ordures à côté de la route. Le sable s’était effondré, enterrant Zinabou jusqu’à la poitrine.. De jeunes hommes qui passaient essayèrent de porter secours, saisissant Zinabou sous les bras et la tirant. Dans le mouvement, sa colonne vertébrale se brisa. L’hôpital local l’opéra, sans succès. Elle était à présent paraplégique. La famille et les amis épuisèrent leurs maigres ressources en cherchant à soigner Zinabou à l’hôpital. Elle fut ramenée à la maison, où les escarres effrayantes s’étaient développées.
Ibrahim me dit qu’il avait entendu parler de notre opération de coopération communautaire s’occupant des handicapés et de leurs familles. « Pourriez-vous aider Zinabou s’il vous plaît ». Je vis les larmes dans ses yeux.
Au cours des mois suivants, une de nos employés, Rebecca, travailla étroitement avec la famille. Zinabou fut réadmise à l’hôpital, et grâce aux antibiotiques et aux soins, les plaies furent partiellement guéries, mais l’infection avait maintenant attaqué les os. J’étais perturbé. Comme souvent en pareils cas, j’ai souhaité pouvoir en faire plus.
Pendant toute cette période, j’étais sidéré par l’esprit calme et paisible de Zinabou. Elle continuait à dire, “Monsieur, toutes choses sont avec Dieu, ne vous en faites pas s’il vous plaît.” Si seulement je pouvais avoir son esprit calme et sa foi. Finalement Zinabou demanda à rentrer chez elle. Je lui ai rendu visite une fois. Comme elle était assise tranquillement sur le sable devant sa hutte, il semblait que son esprit paisible et aimant se souciait de sa famille entière et des autres dans le village, en quête quotidienne pour la survie, dans le pays le plus pauvre de la terre.
Tôt, un lundi matin, Rebecca vint à notre maison me dire que Zinabou mourut pendant la nuit. Je me rendis directement chez elle. Elle était déjà enterrée. Ibrahim m’embrassa. Ses mots qu’il me dit en français m’étonnèrent. En substance, il dit “M. David, je sais que vous êtes chrétien et je suis musulman, mais je veux que vous sachiez que votre travail de coopération avec Zinabou au cours de ces derniers mois, lui a montré qu’il y a un Père aimant qui accueillerait sa maison. Elle n’avait pas peur de mourir.”
Dans les années qui suivirent, je pensais souvent à Zinabou et je priais pour qu’il me soit possible d’avoir sa tranquillité d’esprit et sa foi. Il m’est aussi venu constamment à l’esprit qu’il y a tellement de choses au sujet de Dieu que nous ne connaissons pas. Le privilège reste que nous pouvons travailler à être les mains et les pieds de Jésus pour ceux qui sont marginalisés.
C’est une histoire forte. Elle porte beaucoup de messages. Je pourrais presque finir la session de ce matin ici. Soulignons quelques points : Elle parle d’une foi puissante en Dieu et en son semblable ; de la manière dont les personnes atteintes d’une incapacité peuvent enrichir la vie de ceux qui les entourent ; de l’amour d’un père ; de comment la pauvreté peut marginaliser les personnes infirmes en les tenant à l’écart des services dont elles ont besoin ; du privilège qui est que Dieu travaille par nous sans pouvoir toujours comprendre comment.
C’est une tâche difficile que de poursuivre cette histoire avec un canevas pour étudier comment nous tous pourrions répondre aux personnes comme Zinabou et sa famille.
Avant d’aller plus loin, je voudrais faire remarquer que selon le sens habituel, je n’ai pas ’d’handicap’, donc je ne peux me faire le porte-parole de ce groupe. Je suis cependant un fervent partisan et avocat de la philosophie qui sous-tend le slogan des Handicapés internationaux qui est : vous ne devriez “rien faire nous concernant sans nous !” Je crois passionnément aux droits et aux possibilités que les handicapés ont de faire partie de la vie sociale de tous les jours. J’espère ainsi que les personnes handicapées me permettent de me tenir en leur présence et de parler avec elles de cette question dans ce forum.
Marginalisation des personnes handicapées – la réalité et la réponse
Une de mes fonctions au cours des années, a été de travailler avec des spécialistes du handicap aussi bien qu’avec des services traditionnels et des organisations de développement pour regarder comment ils peuvent travailler avec des personnes ayant divers types de handicap, et comment les inclure dans leurs programmes. Chacune de ces visites me rappelait tristement que la réponse à la première de nos questions est tristement un retentissant « OUI » : les personnes handicapées et leurs familles forment souvent un groupe marginalisé, si ce n’est pas un des groupes les plus marginalisés dans n’importe quelle communauté.
Bien sûr, l’une des premières questions que je pose au cours d’une de ces visites est “Les personnes handicapées sont-elles prévues dans vos programmes ou vos services ?” Le plus souvent, on me dit il n’y a aucune personne handicapée présente. Quand je demande pourquoi, ils avancent d’habitude une de ces trois explications. D’abord, que nous ne nous occupons pas du handicap, c’est une affaire de spécialiste. Deuxièmement, qu’il n’y a pas de personnes handicapées dans la communauté. Troisièmement, que nos programmes sont ouverts aux personnes handicapées, mais qu’elles ont choisi de ne pas venir. J’aimerais que nous réfléchissions tour à tour sur chacune de ces réponses.
C’est une affaire de spécialiste … Vraiment … ?
Je me demande à ce stade combien d’entre vous ont regardé le programme ce matin et se sont demandés s’il était nécessaire de venir ? Peut-être, en pensant que “cela pourrait (somme toute) être intéressant, mais ça ne me concerne pas vraiment. Nous ne « faisons » pas le handicap. C’est pour les organismes spécialisés dans le handicap comme CBM, ou la Mission pour la lèpre ou d’autres de ce genre. Peut-être que mon temps serait mieux utilisé pour une autre réunion ?” Soyez rassurés, vous n’êtes sûrement pas les seuls penser ainsi. Hélas, c’est une pensée courante qui se perpétue dans l’approche médicale du handicap.
Dans cette approche médicale, les gens souffrant d’un handicap sont perçues comme ayant un problème dans leur esprit ou dans leur corps qui doit être ’réparé’, souvent par le spécialiste et les professionnels en réadaptation. Résoudre le problème des personnes en question leur permettrait à nouveau de participer à la vie de la société. Si nous pouvions réparer les personnes, elles pourraient se rendre à l’église, aller à l’école, suivre nos programmes, avoir du travail, etc, comme celles qui n’ont pas de handicap. En tant qu’institutions traditionnelles, les églises et apparentés, notre rôle, le cas échéant, était d’orienter les personnes handicapées vers les services spécialisés et de les accueillir, avec un peu de chance, une fois que leur problème médical serait réglé. Hormis cela, ’le handicap n’est vraiment pas notre affaire.
Cette vision purement médicale du handicap, quoique bien intentionnée, a contribué à la marginalisation continue des personnes handicapées. Il a été dit que leurs besoins sont toujours spéciaux et à part, et doivent donc être pris en charge uniquement par le spécialiste. Ce qui a permis aux organisations excluant les handicapés de justifier pourquoi elles ne travaillent pas avec des personnes handicapées et avec leurs familles. J’ai entendu ce discours pour ’spécialiste-seulement’ comme une ’morne routine de handicapé’. Comme par exemple aller à la salle de gym, marcher sur le tapis roulant d’entraînement de ’spécialiste’ et ne trouvant aucun moyen de s’arrêter, de descendre et de remonter sur le même tapis roulant que tous les autres utilisent. Vous pouvez marcher ou courir parallèlement à n’importe qui d’autre, mais jamais vous ne pourrez faire vraiment partie de la même communauté et profiter des mêmes opportunités que les autres. N’est-ce pas de la marginalisation ?
Un des problèmes-clés de la marginalisation, pour les personnes handicapées dans la monde des adultes, continue d’être leur marginalisation ou leur exclusion de ce qui est convenu d’appeler la société ’traditionnelle’. C’est-à-dire : ont-elles les droits et les possibilités d’être partie prenante dans les mêmes opportunités, rapports, décisions, etc, que les autres dans leur communauté ? Je voudrais que vous considériez un instant vos programmes. Dirigez-vous, par exemple, des groupes de jeunes ? Des activités d’église ? Des programmes d’éducation ? Des programmes de santé ? Des moyens d’accès à l’eau potable et à de bons équipements sanitaires ? Des moyens de subsistance ? Les personnes handicapées et leurs familles ne devraient-elles pas avoir le même droit de participer aux bénéfices et aux opportunités que représentent ces activités et toutes les autres ? Peut-être que des personnes handicapées sont engagées dans certains de ces programmes, mais ont-elles de réelles occasions d’y participer comme n’importe qui d’autre, ou le font-elles à part, de leur côté ? J’ai vu par exemple, des églises bien intentionnées, réserver de la place, une partie importante ou même tout un culte, pour permettre aux personnes handicapées d’assister. Est-ce cela l’approche juste ou cela contribue-t-il à la marginalisation d’une façon différente ?
À ce stade, il est important de reconnaître que pour beaucoup de personnes handicapées, particulièrement celles qui font partie du monde des adultes, leur premier ou même leur seul contact avec des services se fait souvent avec des organisations chrétiennes. Nous devrions avoir une certaine fierté du fait que certaines des régions où il est le plus difficile de travailler, et que certains des groupes les plus marginalisés et les plus prenants, en incluant les personnes handicapées, ont été souvent atteintes par diverses organisations chrétiennes ou ordres religieux. Ma propre organisation, CBM,- travaillant maintenant dans plus de 100 pays, a été fondée, il y a environ 100 ans, par un pasteur allemand qui s’est senti attiré par les régions du Moyen-Orient pour travailler avec les personnes handicapées.
Alors que nous devrions savourer une certaine fierté de par nos efforts à travailler avec quelques groupes marginalisés, une note d’avertissement devrait aussi avoir sa place. Parfois nos meilleures intentions et nos efforts constants dans l’action en faveur des plus désavantagés, se sont réalisés au prix d’une réflexion sur les implications et sur ‘comment pourrions-nous rendre les choses meilleures’. Nous pourrions apprendre ici une précieuse leçon de la part de Jésus. Il a régulièrement pris le temps et l’espace pour réfléchir et prier pour ce qu’il faisait, ou avait fait, et pourquoi. Dans le domaine du handicap, l’organisation chrétienne adoptait souvent une attitude de ’charité’ à l’égard des personnes handicapées. Nous nous sommes concentrés à faire des choses pour les personnes handicapées, en leur fournissant des soins. On ne les a pas encouragés, pas plus qu’on ne s’attendait à les voir jouer un rôle actif pour identifier ou répondre à leurs besoins, ou contribuer dans leur communauté, que ce soit dans leur église, leur vie de famille, leur commerce, ou, en fait, dans leur propre réadaptation. Quoique bien intentionnée, cette approche peut être quelque peu paternaliste ou du style patronage. Ce qui a aussi contribué à renforcer la croyance que les personnes handicapées sont un cas spécial, et le fait que nous devions nous occuper d’elles, plutôt que de croire en elles, et de leur assurer des opportunités de participer et de contribuer dans nos communautés. Cela aussi pourrait être considéré comme une forme de marginalisation.
Ici, je crois que nous pouvons nous tourner vers les Évangiles et prendre note d’une d’instruction. Dans Luc 14:15-24,- un homme invite avec empressement tous les gens à sa table pour un repas, y compris les pauvres et les handicapés. Il y a un réel intérêt qui se porte sur l’invité présent et ceux qui sont là, plutôt que sur les différences ou la guérison de ces gens. L’analogie avec la maison de Dieu est qu’elle sera pleine quand elle contiendra toutes les personnes marginalisées – pauvres, invalides, méprisées, etc. Chaque personne devrait avoir les mêmes droits et possibilités de faire partie de la maison de Dieu. Ne devrait-il pas en être de même dans nos programmes et nos activités ?
La vérité est que parfois les personnes handicapées et leurs familles ont réellement besoin de services spéciaux. Mais pas toujours. Parfois, ils devraient potentiellement avoir accès aux mêmes écoles, offices religieux, centres médico-sociaux et programmes d’insertion professionnelle, comme les autres. Je vous demande de mette en parallèle cela avec votre foi. Quand un défi se présente dans nos vies, ou ce que certains appelleraient ’une crise de foi’, l’abordons-nous toujours avec les compétences spécialisées de notre responsable ou de notre pasteur ? J’aurais tendance à penser que dans la plupart des cas la réponse est « Non ». Nous avons recours souvent à la capacité d’écoute, aux réflexions et aux expériences de nos collègues, tant dans qu’en dehors de notre communauté d’église. Il peu arriver que passions du temps avec notre responsable pour tester nos idées …, mais sans faire que cela. Nous en retirons aussi quelque chose du spécialiste et des autres. Cette même approche ’double piste’ a du sens dans le domaine du travail avec les personnes handicapées et procure une cadre solide pour réduire le marginalisation des personnes handicapées.
Ainsi, qu’est-ce que cela signifie-t-il pour vous ? Peut-être votre organisation pourrait-elle se mettre en relation avec quelques-uns des services spécialisés et avec des personnes handicapées elles-mêmes, pour mettre au point la meilleure façon de s’assurer que les personnes handicapées sont intégrées. Ceux parmi vous dans les organisations spécialisées pour personnes handicapées, comment parvenez-vous à soutenir les personnes handicapées et d’autres organisations, les églises et autres ? Une société non-exclusive est un partenariat, dans ce cas, elle inclura probablement les personnes handicapées, les agences pour personnes handicapées et les associations communautaires traditionnelles, et bien sûr, les personnes handicapées elles-mêmes.
Si vous ne retenez rien d’autre de la séance plénière de ce matin, j’espère que vous partirez avec la notion que le marginalisation des personnes handicapées est de la responsabilité de toutes les personnes et organisations pour sensibiliser tant celles qui sont spécialisées que celles qui sont traditionnelles.
’Elles’ ne sont pas présentes … Ou bien … ?
Considérons maintenant la deuxième réponse à ma question relative aux personnes handicapées et à leurs familles qui ne suivent les programmes. C’est-à-dire la réponse que “il n’y a pas de personnes handicapées dans notre communauté ?” Pour être franc, cette réponse est difficile à accepter avec ce que nous connaissons du handicap.
La Banque mondiale estime que, quelle que soit la population, au moins 10 % ont un handicap. Cela veut dire qu’environ 650 millions de personnes dans le monde entier ont un handicap. Les chiffres augmentent en relation avec, par exemple, la pauvreté, le vieillissement de la population et les progrès dans les soins médicaux. Si toutes les personnes handicapées appartenaient à une seule nation, elle serait la troisième plus grande nation après la Chine et l’Inde, et je pourrais ajouter, sans doute une des nations les plus défavorisées dans le monde. Nous savons aussi que, quand les aides-soignants son pris en compte dans les chiffres, plus de 25 % d’une population donnée est affecté par l’handicap.
Je soulève ici le cas des aides-soignants, c’est-à-dire les proches qui aident les personnes handicapées, parce que la marginalisation des personnes handicapées, par exemple, dans l’éducation, l’emploi, ou même l’assistance à un service religieux, peut s’étendre à la famille des personnes handicapées. J’utilise un exemple simple et malheureusement banal pour illustrer cela. Imaginez un grand-parent atteint d’une cataracte, devenu aveugle, et dépendant des autres. C’est souvent un petit-enfant, ou plus généralement, une petite-fille, qui sera retirée de l’école pour être ’les yeux’ de cette personne. En Afrique, ils mènent cette personne autour de ce qui est appelé dans quelques régions un ’bâton Fulani’. Les parents de la fille continuent à travailler pour nourrir leur famille. Cela peut affecter sa vie propre dans beaucoup de domaines : son éducation, ses perspectives d’emploi pour l’avenir et même la chance d’avoir juste une enfance, et de jouer avec ses amis. Quand nous pratiquons des opérations de la cataracte ou la réadaptation, dans ces régions, il y a souvent une cérémonie de ’brisement du Fulani’ parce que deux personnes ont de nouvelles possibilités de vie.
Il y a aussi un lien étroit entre le handicap et la pauvreté. Alors que toutes les personnes handicapées ne sont pas pauvres, il est estimé que 20 % des personnes les plus pauvres du monde sont handicapées et sont considérés souvent par leurs communautés comme les plus défavorisés. Environ 260 millions de personnes handicapées, ou 43 % de la population des personnes handicapées vivent avec moins d’un dollar US par jour. Si vous vivez dans la pauvreté, vous avez plus de risques d’être exposé aux conditions qui conduisent au handicap, comme la malnutrition et l’accès limité à la Sécurité sociale, au logement salubre et à l’eau potable. De même, une personne handicapée et ses proches vont avoir probablement moins d’accès à la réadaptation, l’éducation, l’acquisition de compétences et l’emploi qui peut réduire la pauvreté. Malheureusement, Zinabou en est un exemple limpide mais pas rare.
En raison de la nature de cette réunion, beaucoup d’entre nous se sont investis intégralement dans la tâche d’éradication de la pauvreté ou du moins, d’identification de ses symptômes. Le Réseau Michée et le Défi Michée sont, parmi d’autres choses, une réflexion de nos tentatives collectives d’aborder cette question, formulée avec nos convictions chrétiennes. Sachant qu’il y a un lien si étroit entre la pauvreté et le handicap, et que 80 % de personnes handicapées vivent dans des pays en voie de développement, nous devons nous demander : pouvons-nous nous attaquer avec succès à la pauvreté si les personnes handicapées et leurs familles continuent d’être marginalisées au sein de leurs communautés élargies et de leurs programmes ? Les objectifs de développement du Millénaire peuvent-ils être réalisés si les personnes handicapées continuent d’être exclues des programmes et des plaidoyers qui les concernent ? Un « NON » massif est la réponse à cette question.
Réfléchissant sur ces faits, la suggestion que les personnes handicapées ne sont pas présentes dans les communautés où nous vivons et travaillons, commence à sembler presque absurde. Elle suggère plutôt qu’elles ne participent pas ou que cela ne saute pas aux yeux. Si la question n’est pas sous notre nez, est-il est acceptable pour autant de l’ignorer ? Pour des chrétiens et des êtres humains, je penserais que non ! Ce n’était pas certainement acceptable pour Jésus. Il a recherché les personnes handicapées, aussi bien que d’autres groupes marginalisés par la pauvreté, la race, le style de vie, le type d’emploi, etc. Nous devrions suivre Son exemple une fois de plus.
Pour illustrer, je voudrais donner un exemple d’une organisation chrétienne de développement répondant au tremblement de terre au Pakistan, avec laquelle on nous a demandé de travailler. Quand nous avons demandé où se situaient les personnes handicapées dans leurs programmes, ils ont répondu qu’ils n’avaient connaissance d’aucune. Ils ont été interpellés pour considérer que cette catégorie et leurs familles existaient bien dans la communauté, mais il va falloir peut-être les rechercher. Une fois qu’ils ont assimilés ce fait, j’ai le plaisir de dire que cette organisation a continué de prendre du temps pour savoir comment planifier et intégrer les personnes handicapées dans leurs divers secteurs et mettre en place des procédures et des partenariats avec des organisations pour handicapés et des membres de la communauté, afin d’aider à identifier les personnes handicapées qui pourraient et devraient avoir accès à leurs programmes d’urgence et de développement. Ils ont travaillé pour, à la fois, développer et apprendre du DPO’s et ont fourni un accès à ces groupes jusqu’ici marginalisés pour qu’ils rejoignent les rassemblement de groupes de l’ONU, et ont établi des mécanismes de coordination en cas de tremblement de terre. Ils ont aidé ce groupe marginalisé à rejoindre la réponse traditionnelle. Dans un autre exemple, l’offre des réseaux Michée et le manuel des directives nous ont mis au défi de trouver les personnes handicapées et de les inclure dans toutes les étapes de nos programmes, aussi bien comme partie prenante dans le développement du programme que comme bénéficiaires potentiels. Ces lignes directrices mettent de nouveau en évidence qu’il n’est pas toujours nécessaire de faire quelque chose de spécial et de différent, mais il nous faut vraiment considérer comment ces groupes marginalisés sont inclus dans nos programmes.
Nous nous attendrions donc à ce que, dans n’importe quelle communauté où nous vivons ou travaillions, il y ait des personnes handicapées avec leur famille. Cependant, pour une quelque raison, ils ne participent pas, ou sont exclues. À ce stade, je me demande si quelques-uns d’entre vous pensent à certains de vos programmes, à votre église, à votre école, à votre communauté, et se sont dit “Je n’y vois personne” ou bien “Je peux seulement penser à quelques personnes handicapées qui sont impliquées.” Ainsi, comment allez-vous commencer à vous occuper de cela ? Comment suivrez-vous les exemples de Jésus et rechercherez-vous les personnes handicapées ?
’Elles’ sont bienvenues … Mais le sont-elles vraiment ?
Maintenant, venons-en à notre troisième réponse à la question : pourquoi les personnes handicapées sont marginalisées dans notre communauté et/ou nos programmes. Peut-être, certains d’entre vous pensent aussi : “Nous n’excluons pas les personnes handicapées de nos programmes. Elles pourraient participer si elles le voulaient.” La vérité est que cela n’est pas souvent le cas. Nous n’excluons pas ou nous ne marginalisons pas intentionnellement souvent les personnes handicapées, mais souvent nous pouvons par mégarde y contribuer malgré nos théories, pensées, craintes, programmes et pratiques.
Voir le handicap comme une question sociale, nous donne une base pour examiner certaines des façons dont les personnes handicapées sont marginalisées, tant intentionnellement qu’involontairement. Cela nous donne aussi des indices sur ce que nous pouvons faire en tant qu’églises, organisations et individus pour combattre cette marginalisation. Cette approche dit qu’une personne a un handicap dans son mental ou dans son corps, mais c’est par l’interaction avec l’environnement qu’elles sont handicapées ou exclues de la participation à la vie sociale quotidienne. Ces barrières discriminatoires peuvent être des systèmes ou des politiques, des barrières comportementales et/ou des barrières imposées par l’environnement physique.
Considérons brièvement chacun d’entre elles. D’abord, les barrières systémiques peuvent marginaliser les personnes handicapées. Votre église ou votre gouvernement, ont-ils une politique qui exclut ou sépare les personnes handicapées ? Par exemple, quelques gouvernements n’ont pas de lois ou de politiques accordant aux personnes handicapées le droit de suivre l’école. D’autres disent qu’elles le peuvent, mais seulement dans des écoles spéciales ou séparées. Dans l’aspect le plus positif, quelques organisations respectent le principe d’égalité des chances face à l’emploi ou encouragent même les personnes handicapées à postuler ; ou respectent des quotas de personnes handicapées à embaucher ? Quel rôle, en tant qu’organisations chrétiennes, pourrions-nous jouer dans l’élaboration de systèmes, politiques et pratiques, dans notre nation, organisation, ou congrégations, en vue d’abolir la marginalisation des personnes handicapées ?
Deuxièmement, et peut-être la plus simple des barrières de marginalisation que nous pouvons faire tomber : l’environnement physique. Demandez-vous, si une personne dans un fauteuil roulant ou avec des béquilles, ou une personne malvoyante ou malentendante, pourrait participer à vos programmes ou accéder à vos bâtiments ? Y a-t-il des marqueurs de guidage ? Une rampe ? Les gens qui travaillent dans votre organisation ou qui fréquentent votre église, savent-elles ce qu’est le handicap ? Savent-elles comment accueillir un enfant atteint de paralysie dans des groupes de jeunes ? Comment guider une personne aveugle ? Il n’est pas nécessaire que tous nous devenions des spécialistes dans ces domaines, mais s’il advenait qu’il faille accueillir une personne handicapée et/ou les siens dans nos programmes, que serions-nous capables ou préparés à faire pour les recevoir ? A qui pourriez-vous en parler dans votre communauté pour le savoir ?
Je m’imagine très bien ce que vous pensez en ce moment, que nos programmes n’ont pas les fonds pour entreprendre ces choses ! C’est une autre question qui mérite considération à un autre moment. En bref, cependant, des bâtiments accessibles ne coûtent, si les aménagements sont prévus sur les plans, qu’une fraction du coût des travaux ’d’aménagement’ des bâtiments après coup. De plus, comme les personnes handicapées sont de plus en plus reconnues comme groupe marginalisé, des financements et des soutiens en faveur de l’accessibilité apparaissent lentement – que ce soit pour les bâtiments, les appareils électroniques, ou les transports, etc … Qui pourriez-vous contacter et vous associer pour avoir accès aux aides dans votre région ?
Troisièmement, et parfois la plus discriminatoire des barrières touche aux attitudes. Nos considérations et nos convictions sur le handicap et les personnes handicapées sont souvent la principale cause, parfois imprévue, de leur marginalisation. Nous admettons souvent qu’une personne handicapée ne serait pas capable de participer, ou nous ne nous attendons pas à ce qu’elle le soit. Dans certaines cultures, on croit que le handicap est un châtiment pour les péchés passés, ou le résultat d’une visite d’un mauvais esprit ou encore une malchance. Dans d’autres cultures, il y a la crainte, indépendamment de la cause du handicap, d’attraper soit des maladies, la malchance ou des mauvais esprits. De telles croyances sont une cause principale de la marginalisation des personnes handicapées, et dressent une barrière importante pour leur admission dans les activités communautaires quotidiennes.
Comme chrétiens, nous devrions suivre la trace de Jésus dans la contestation de ces d’attitudes discriminatoires. Par exemple, dans Jean 9:1-7, Jésus a bravé les préjugés sur le handicap. Quand ses disciples l’interrogèrent pour savoir si c’était les péchés des parents ou les péchés de la personne qui l’ont condamnée à naître aveugle ? Jésus répondit, “Sa cécité n’a aucun rapport avec ses péchés ou les péchés de ses parents. Il est aveugle pour que l’on puisse voir la puissance de Dieu à l’oeuvre en elle.” Le passage continue et décrit comment, en se fondant sur la foi et l’intime conviction de cet homme, sa vue est rétablie. L’histoire de Soloveni qu’il partagera plus tard est un exemple frappant de la puissance de Dieu.
Il y a une autre leçon illustrée dans le même passage, aux versets 19 à 21. Ici, on nous rappelle de nouveau que les personnes handicapées devraient être au centre de tout ce qui les concerne au premier chef. Lorsqu’ interrogés par les autorités incrédules voulant savoir si leur fils était vraiment aveugle comment il pouvait voir maintenant, les parents ont fait des déclarations qui sonneraient justes aujourd’hui selon une approche du handicap fondée sur les droits. Ils ont dit, “Demandez-lui. Il est assez grand pour répondre lui-même.” Combien de fois excluons-nous involontairement les personnes handicapées en ne les interrogeant pas sur leurs besoins et leurs désirs ? Faisons-nous participer les personnes handicapées et/ou leurs familles dans la conception, la mise en œuvre et l’évaluation de nos programmes ?
La crainte peut être un facteur majeur de la marginalisation. Les personnes handicapées elles-mêmes peuvent craindre le rejet ou la moquerie, ne pas se sentir en sécurité, ou bien comprises. Je connais les programmes qui ont fait un travail vraiment colossal pour surmonter cette crainte, par des visites multiples aux domiciles des personnes handicapées et de leurs familles pour construire une relation de confiance.
Plus largement, la société redoute souvent le handicap par un manque de compréhension, par exemple, de la manière de communiquer avec les personnes handicapées. A titre d’exemple, mon père m’a raconté une histoire au sujet de ses rapports avec une famille de son église dont l’enfant était paralysé. Je respecte immensément mon père comme un homme qui vit beaucoup sa foi dans ses actions quotidiennes. Cependant, quoiqu’il croyait fortement que cette famille pouvait et devait entièrement faire partie de l’église, sa crainte de ’faire des impairs’ l’a conduit à ne pas se mêler à eux. Beaucoup font de même. Ainsi, tandis que cet enfant et sa famille étaient dans l’église, ils étaient, en un sens, marginalisés par rapport à l’engagement intégral dans leur communauté élargie. Cela ne cadrait pas avec les convictions et la conscience de mon père. Je suis fier de dire, qu’avec un peu d’encouragement, il a finalement demandé aux personnes handicapées, et, plus important encore, à la famille elle-même, quelle était la meilleure façon de parler à leur enfant et de le faire participer. Affronter la marginalisation peut impliquer de sortir de sa zone de confort et de se départir du rôle souvent inconscient que nous y jouons.
Je suis enchanté de voir que nous avons un certain nombre de sessions dans cette convention qui considère la stigmatisation comme une question qui a trait à la marginalisation. Si nous voulons prendre en compte la marginalisation des personnes handicapées, il nous faut donc considérer cela autant que l’autre environnement marginalisant et les politiques décrites plus haut.
Que penserait Jésus du statu quo ?
Ayant exploré certains des sujets concernant la marginalisation des personnes handicapées, je voudrais brièvement réfléchir sur la question : Que Jésus penserait-il de cela ?
À ce stade, certains d’entre vous peuvent penser que vous auriez pu involontairement contribué à la marginalisation des personnes handicapées dans les communautés dans lesquelles vous vivez, adorez et travaillez. Peut-être, y avait-il quelque appréhension ; ou un manque d’information sur ce qu’il convient de faire ? Ou peut-être, une idée préconçue que cette question était trop difficile à considérer et qu’il valait mieux la laisser aux spécialistes ? Peut-être, y avait-il un manque de conscience de la présence même de personnes handicapées et de leurs familles dans votre communauté ? Je vous demande de réfléchir sur ces réponses. Faites en votre affaire, non pas par culpabilité ou déception, mais comme un moyen d’avancer à partir d’ici.
Je pense que Jésus nous interpellerait, nous chrétiens, pour comprendre la problématique à laquelle les personnes handicapées et leurs aides-soignants sont confrontés, et pour chercher activement à les accueillir dans la vie communautaire quotidienne. Tristement, nos églises et nos activités chrétiennes ont souvent reflété le même manque de compréhension et de soutien que la communauté locale, ce qui signifie que les personnes handicapées et leurs aides-soignants n’ont pas leur place.
Jésus était précurseur dans ce domaine. Il a donné la priorité aux personnes handicapées et à leurs aides-soignants. Il y a environ 23 miracles impliquant des personnes handicapées, rapportés dans les Évangiles : 17 d’entre eux concernent des personnes avec des handicaps physiques ou sensoriels, ainsi que leurs aides-soignants. Nous sommes tous familiers des miracles qui sont décrits, en rapport avec la cécité, la surdité, la paralysie et la lèpre. Ils comptent pour plus de la moitié des miracles décrits dans les Évangiles. 6 autres miracles abordent le sujet des maladies mentales. Puis, 3 autres exemples se rapportent à la résurrection des morts, qui pourraient être considérés comme des exemples montrant comment Jésus s’est soucié des aides-soignants. Je pense que Jésus nous empresserait de faire plus et mieux sur ce point, pour réellement suivre son exemple.
Ainsi comment devrions-nous répondre ?
Il y a quelques années, il y avait des bracelets que les gens portaient autour de leurs poignets et qui nous rappelaient, en tant que chrétiens, de rester ferme dans l’exemple laissé par Jésus. Il était inscrit dessus simplement “WWJD ?” ou “Que ferait Jésus ?”.
Cette séance plénière nous accorde quelque temps de réflexion sur les questions de marginalisation des personnes handicapées. C’est une bonne occasion de mettre en évidence l’importance de cette question. Mais maintenant comment suivons nous les traces de Jésus et comment sommes-nous des hommes et des femmes d’action ?
Si vous n’avez pas été impliqués dans le travail avec des personnes handicapées auparavant, vous pourriez penser maintenant que vous devriez commencer à aborder cette question. Vous demanderez probablement alors : où commençons-nous ? Fort heureusement, nous avons partagé quelques suggestions tout au long de ce papier. Cependant, comme on arrive à la fin de cette session, j’offre encore quelques conseils supplémentaires.
D’abord, je suggère que vous commenciez près de chez vous. Votre propre comportement, vos locaux et votre politique de personnel tiennent-ils compte du handicap ? Une personne handicapée pourrait-elle entrer dans votre église, suivre vos programmes, chercher un emploi dans votre organisation ? Je connais des églises au Royaume-Uni, par exemple, qui se sont associées à des organisations pour personnes handicapées pour organiser “Le dimanche du handicap” – ce sont des programmes avec des sermons, des activités pour groupes de jeunes, destinés à éveiller la conscience au handicap et à l’accueil des personnes handicapées. Ils exigent la réflexion en tant que chrétiens sur la manière dont nous répondons dans un sens tant pratique que théologique aux questions de la marginalisation, en rapport avec le handicap. Ils recherchent activement, encouragent et invitent les personnes handicapées à venir, avec espoir, tout le temps, mais particulièrement ce jour-là.
Deuxièmement – Prenez l’engagement d’identifier et d’apprendre des personnes handicapées et des organisations spécialisées dans le handicap dans votre région. Demandez-leur de travailler avec vous. Si vous êtes une organisation spécialisée dans le handicap ou en médecine qui traitent des questions relatives à la prévention du handicap et à la réadaptation, demandez-vous si vous avez-vous pris en compte les questions dont nous avons parlé ici ? Avez-vous activement recherché à rejoindre et soutenir d’autres organisations traditionnelles pour prendre en compte les personnes handicapées ? Vous êtes-vous associé à des organisations pour handicapés, pour renforcer leurs programmes aussi bien que le vôtre ?
Troisièmement, prenez du temps pour réfléchir sur d’autres questions transversales dans le développement. Au niveau technique, et sur le plan du développement, quelles leçons avons-nous apprises de nos tentatives d’incorporer d’autres groupes ’transversaux’ marginalisés dans nos programmes et dans nos réponses ? Les femmes sont de plus en plus reconnues comme marginalisées dans beaucoup de sociétés. Les programmes de développement sont maintenant très sensibles aux indicateurs généraux et ceux liés aux sexe. Ne pourrions-nous pas apprendre quelques leçons de cette expérience qui seraient aisément applicables aux programmes intégrant le handicap ? De même, quelles leçons avons-nous apprises en répondant aux besoins des personnes atteintes du HIV/SIDA et que nous pourrions appliquer à nos efforts pour travailler avec les personnes handicapées comme avec un autre groupe marginalisé ? Beaucoup, je suppose.
Quatrièmement, vous pourriez (et heureusement vous l’avez fait) suivre quelques-uns des ateliers et des sessions ici sur le handicap. Je vous encouragerais, d’autant plus pour des organisations traditionnelles de développement, à suivre l’atelier de mon collègue sur le handicap en général, qui a lieu plus tard dans la journée..
Avant de laisser la place à mon collègue M. Soloveni pour partager son histoire, j’aimerais clore ma partie en partageant une devise qui figurait devant la salle de cours, il y a pas mal d’années. Elle me parle plus aujourd’hui que jamais. Je pense que c’est bien de la garder à l’esprit, alors que vous allez de l’avant pour vous exercer à tenir compte du handicap. Elle déclare “Avant chaque être humain, il y a une légion d’anges proclamant faites place à l’image de Dieu.”
Zinabou était l’image de Dieu. Cependant, elle aurait pu rester dans son campement invisible des autres, ou les gens auraient pu sentir l’odeur de ses blessures ou noter sa paralysie et continuer la route mal à l’aise, ou la laisser aux spécialistes. Ils pourraient pu manquer cette occasion d’apprendre, d’enrichir et d’être enrichis par Zinabou et sa famille,- comme David Lewis l’a expérimenté. Je me demande maintenant si Zinabou ou d’autres comme elles, existent dans votre communauté ? Comment pourriez-vous répondre à cette image de Dieu ?
http://www.throughtheroof.org
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