Auteur : Jon Kuhrt
Ces dernières semaines, les meurtres de trois jeunes hommes dans le sud de Londres, Billy Cox à Clapham, Michael Dosunmu à Peckham et James Andre Smartt-Ford à Streatham, ont fait la une des journaux nationaux. Des émissions télé et radiodiffusées ont débattu du problème et Tony Blair a convoqué un forum avec les représentants de la communauté et la police pour voir ce qui pouvait être entrepris. Beaucoup de gens posaient des questions du genre : « Qu’est-ce qui ne va pas dans nos villes ? » ou « Qu’est-il arrivé à notre jeunesse urbaine ? »
Salut à Londres sud ?
En réponse à ces questions, les Églises chrétiennes de Londres sud ont organisé, le 22 février, avec la participation de Peace Alliance[1], une marche de prière de Peckham à Brixton. L’objectif était de rendre témoignage à la paix et à l’espérance que Jésus donne et d’en faire une déclaration ouverte dans les rues qui venaient d’être associées à la violence et au meurtre. La marche a suivi délibérément un itinéraire traversant de nombreuses frontières entre gangs pour montrer que ces frontières n’ont en fait aucun sens puisque nous sommes tous un dans le Christ Jésus.
J’ai pris part à cette marche de prière parce que l’un des meurtres avait eu lieu très près d’où j’habite à Streatham. Cette expérience a été pour moi à la foi édifiante et profondément stimulante. Cet événement n’a pas timidement encouragé les valeurs chrétiennes – non, la souveraineté de Jésus a été proclamée avec force depuis l’estrade. Et pendant que nous marchions, nous chantions des cantiques que je connaissais bien de mon église ; des chants comme « Car Dieu est un Dieu puissant » ou « Tu viens du ciel sur la terre ». Mais la façon de les chanter était extrêmement différente. Le contexte changeait tout, parce que nous chantions avec une expression d’urgence et de passion, ainsi qu’avec un sentiment de la présence de Dieu que j’avais rarement connu.
La marche était un témoignage de l’Église (majoritairement pentecôtiste) proclamant le salut en Jésus sans aucune gêne, d’une manière audacieuse et vocale. Mais il s’agissait d’une foi profondément intégrée, engagée à rendre témoignage à la puissance de Dieu qui sauve aujourd’hui ; un salut qui est politiquement engagé et socialement pertinent. Un salut qui ne refuse ni la responsabilité personnelle ni la proclamation de la puissance de Dieu pour sauver notre communauté. Un salut qui fait le bien et qui affronte l’injustice. Un salut qui libère les captifs de la peur et chasse les démons de la violence et du désespoir. Cette justice annonce en paroles, en actes et en signes la réalité de la puissance de salut de Dieu. Véritablement une lumière qui brille dans les ténèbres.
Problèmes avec notre conception du salut
La centralité du salut pour la foi chrétienne en fait un concept essentiel qu’il faut bien décortiquer si nous souhaitons l’unité dans la mission de l’Église. Mais, comme l’ont illustré récemment la violence et les morts de Londres sud, notre contexte urbain rend notre discussion urgente. Nous sommes confrontés à des questions qui exigent des réponses de la part de ceux qui ont la foi. Comment sauver nos villes de la violence et de la destruction ? Comment mettre un terme à l’injustice et à la souffrance ? Pouvons-nous espérer un avenir meilleur ?
L’utilisation que nous faisons du mot salut, et d’expressions voisines comme « être sauvé », tombent trop souvent dans un jargon religieux, coulant facilement des pages de la liturgie ou au sein de discussions internes à l’Église. Mais ceux qui sont engagés dans la mission et le ministère chrétiens dans le contexte urbain doivent réfléchir sérieusement sur ce que nous entendons en parlant de salut. Déclarons-nous la totalité de l’Évangile ? Sommes-nous, comme de nombreux faux prophètes de l’histoire d’Israël, coupables de ne dire à « notre peuple » que ce qu’il est prêt à entendre ? [2]
Dans son premier livre, Jim Wallis a développé ce thème. Il a écrit (les italiques sont miennes) : « Les Églises ont laïcisé le royaume en l’identifiant à des idéologies, programmes, mouvements, institutions et gouvernements ; elles l’ont individualisé en le restreignant aux recoins intérieurs du cœur ; elles l’ont spiritualisé en le déplaçant entièrement dans le ciel ; ou bien elles l’ont « futurisé » en n’en parlant qu’en relation avec des événements apocalyptiques de la fin des temps. »[3]
Wallis écrivait au milieu des années soixante-dix, dans le contexte d’une communauté urbaine qui cherchait à mettre en pratique l’appel radical de l’Évangile au travers d’un style de vie contre-culturel et d’une résistance politique. Son expérience des défis rencontrés par les pauvres urbains le laissait insatisfait à la fois devant l’étroitesse de l’évangélisme et devant la sécheresse spirituelle du libéralisme.
Les divisions actuelles entre « évangélique » et « libéral » font courir le risque de proclamer deux messages séparés et distincts quand il s’agit d’annoncer l’évangile. L’un est un message essentiellement axé sur le salut personnel et l’autre un message qui tourne autour du salut social. Notre division selon ces termes mine tragiquement le témoignage de l’Église parce que les deux parties sont sous-alimentées par la division. En fait, ni l’évangélisme étroit ni le libéralisme nébuleux ne sont véritablement une bonne nouvelle pour la ville.
Nous ne devons pas en rester là. La crise de violence, de pauvreté et de manque de sens qui secoue nos zones urbaines a désespérément besoin de la bonne nouvelle du royaume de Dieu. Comment pouvons-nous partager un Évangile holistique qui intègre les impératifs personnels, sociaux et politiques du salut ?
Un salut personnel et social
Shaftesbury travaille aux côtés d’un grand nombre d’Églises de différentes obédiences présentes dans des zones urbaines. En cherchant à les soutenir dans leur mission auprès de leur communauté, nous discutons souvent du fait que la foi chrétienne revêt des dimensions à la fois profondément personnelles et sociales.
Dans la discussion autour de la dichotomie entre les implications personnelles et sociales du péché et de l’Évangile, nous avons trouvé le diagramme suivant utile et stimulant[4].
Traduction des éléments du diagramme ci-dessus :
Nous avons trouvé dans ce modèle un outil utile pour étudier ce que signifie le salut dans le contexte urbain, parce qu’il souligne la nature intrinsèquement personnelle et à la fois sociale tant du péché que du salut.
Trop souvent, au cours de l’histoire, l’Évangile a été individualisé pour convenir aux riches et aux puissants, et nier la critique biblique radicale du péché social et structurel. Il faut que cela soit mis en lumière, mais pas en faveur d’un accent disproportionné qui laisse de côté les aspects personnels du péché et du salut. Ce serait tout aussi inefficace et dangereux. L’analyse des questions urbaines que font les classes moyennes (les SDF en sont un formidable exemple) tombe trop souvent dans le piège qui consiste à minimiser l’action individuelle et la responsabilité personnelle d’une façon qui sonne tout simplement faux dans l’expérience réelle de la vie.
Pour éviter le mouvement de balancier entre les extrêmes de cette fausse dichotomie, il est essentiel de creuser plus profond, de saisir la profondeur de la conséquence du péché sur le monde entier et prendre à bras le corps la nature radicale et holistique de notre salut dans le Christ. Comme l’a écrit Vinay Samuel : « La totalité de la vie sociale et personnelle est le sujet du souci et de l’action de Dieu ».[5]
La plénitude du salut
Le tableau biblique du salut est riche et comporte de multiples facettes. La totalité du « métarécit » biblique est une histoire du salut : comment un Dieu créateur plein d’amour met en œuvre son dessein rédempteur pour toute la création. Au sein de ce grand tableau, nous pouvons dégager quatre façons interconnectées pour décrire le salut : [6]
1) Le salut en tant que plénitude
Dans la Bible, nous voyons que le salut a pour centre la réintégration de la personne dans son intégralité (pas seulement son « âme ») dans un réseau correct de relations. Le salut englobe le pardon en relation tant les uns avec les autres qu’avec Dieu. Mais il englobe également la guérison et une juste attitude vis-à-vis des autres et de la création tout entière. Jésus nous en donne un bon exemple en déclarant : « Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison », au moment où le riche citadin Zachée a rejeté son ancien style de vie et donné la priorité à la restauration de ses relations avec sa communauté (Luc 19). Cette plénitude est essentiellement sociale. D’un point de vue biblique, le salut n’est jamais considéré comme un sujet purement individualiste.
C’est particulièrement important dans le contexte urbain où les relations entre les groupes sont souvent litigieuses. L’étroite proximité de groupes différents ayant chacun sa vision du monde et ses points de vue conduit fréquemment à la fragmentation de la communauté et à l’élargissement des divisions entre des groupes de personnes sur la base de leur ethnie, de leur âge ou de leurs limites géographiques (comme pour les gangs de Londres sud). Le salut que nous avons dans le Christ transcende ces divisions parce que dans le Christ, « il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme, car vous tous, vous êtes un en Christ-Jésus. » (Galates 3.28) Quelle merveille quand des assemblées incarnent cette vérité dans l’étonnante diversité de l’humanité.
À un niveau plus personnel, la nature exigeante du contexte urbain est source d’anxiété, de maladie mentale et d’exclusion de ceux qui sont différents. Dans le ministère de Jésus, nous voyons la guérison et la plénitude aller main dans la main. Les guérisons des individus sont les signes du royaume où les personnes sont pleinement restaurées dans la communauté (p. ex. Luc 4.31-37 ; 8.26-39).
2) Le salut en tant que libération
Le salut entraîne la libération de l’oppression. La meilleure illustration de cette libération est celle du récit de l’Exode, où Israël est libéré de l’injustice et de l’oppression de l’esclavage. Dans les livres de prophètes comme Ésaïe, Jérémie, Amos et Michée[7], nous voyons une dénonciation du péché exprimé et incarné dans des structures sociales qui oppriment et déshumanisent. On trouve une expression politique similaire de l’injustice en Apocalypse 13, où la puissance économique et militaire de Rome est dépeinte sous les traits de bêtes qui engendrent captivité et oppression.
Ainsi, le tableau biblique du salut est profondément politique tout en étant personnel. À Philippes (Actes 16.16-40), nous voyons Dieu agir par l’intermédiaire de Paul et de Silas pour libérer une servante manipulée par ses maîtres pour un profit financier. Cet acte de transformation conduit à ce qu’ils soient battus de verges et emprisonnés. Il conduit également à un nouveau défi aux autorités.
Cette façon de défier les puissances du monde est bien évidemment applicable aux conditions socialement oppressives des zones urbaines. Les force sociales, politiques et économiques qui sont à l’œuvre dans la ville, et qui oppriment ceux qui vivent en marge, ne sont pas la réalité véritable (ce sont de « faux absolus ») et elles seront transformées un jour dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre (Ésaïe 65.17-25 ; Apocalypse 21.1-5). Notre tâche consiste à déclarer et à incarner cette vérité par anticipation sur cette époque, à prier, agir et lutter pour la libération.
3) Le salut en tant que pardon
Un axe biblique central du salut est le fait que des personnes connaissent le pardon de la culpabilité qu’elles éprouvaient pour avoir participé à des méfaits. Dans le même esprit que celui de la Pâque, Dieu a agi en Jésus à la fois pour vaincre et pardonner équitablement le péché de l’humanité plutôt que de se contenter de fermer les yeux. La nature de notre pardon dans le Christ peut être soulignée de différentes façons (le Christ en tant que notre représentant, notre participation dans le Christ ou le Christ comme notre substitut), mais chacune implique d’accepter personnellement la culpabilité et de saisir la grâce de Dieu par le pardon.
La mort de Jésus sur la croix opère une profonde réconciliation entre l’humanité et Dieu. Jésus nous met au défi de suivre le chemin de la croix, comme l’énonce Samuel : « La réconciliation accomplie à la croix a des implications sociopolitiques et culturelles profondes. Comment les êtres humains peuvent-ils traiter les conséquences mauvaises des actions humaines, les leurs, celles de leurs ancêtres et d’autres qui les ont gouvernés ? Peut-on inverser de telles conséquences ? »[8]
Il va sans dire, mais il est cependant important de l’énoncer (en particulier dans le contexte actuel des divisions acerbes au sein de l’Église), que notre expérience de la grâce de Dieu doit déborder dans nos relations avec notre prochain. L’histoire du serviteur impitoyable racontée par Jésus illustre ce point de façon frappante (Matthieu 18.21-35). Pardonner, ce n’est pas passer sous silence les méfaits que nous avons commis, mais en reconnaître la réalité et accepter notre culpabilité devant Dieu et devant nos prochains.
Le besoin du pardon et de la grâce est profondément important dans la vie urbaine, où nous voyons la destruction causée par des conflits non résolus et par la spirale descendante de la vengeance. Je suis personnellement frappé, chaque fois que je prends l’autobus local, par l’importance que prennent les représailles, dans la conversation des jeunes de mon quartier. Je passe régulièrement à bicyclette devant le site d’une attaque au couteau à Mitcham, Londres sud, où des fleurs et des cartes ont été déposées pour le jeune homme qui a été assassiné. Quand j’ai lu les diverses cartes et paroles de rap laissées en son honneur, le fil dominant en était celui des représailles et de la vengeance pour sa mort plutôt que celui d’un appel à la paix ou d’un quelconque sentiment d’espérance. Je trouve leur lecture particulièrement déprimante.
Le livre de Desmond Tutu, Il n’y a pas d’avenir sans pardon (éd. Albin Michel), illustre les dimensions politiques du pardon dans le récit étonnant et miraculeux de la Commission vérité et réconciliation d’Afrique du Sud. Il s’agit de la nature salvatrice de la grâce de Dieu, incarnée dans un processus politique à la recherche d’une vérité et d’un pardon au-delà de la portée du processus normal de la loi. C’est un exemple frappant de la grâce salvatrice de Dieu qui a eu le pouvoir de sauver la vie d’individus et des communautés tout entières de la récrimination amère et destructrice.
4) Le salut en tant qu’affirmation personnelle
L’histoire chrétienne est profondément positive pour l’humanité. Nous sommes en effet créés à l’image du Dieu créateur, son identité est imprimée sur chaque personne. Ce sont cette identité et cette valeur qui sont affirmées par l’action salvatrice du Christ. « Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique » (Jean 3.17). Bien sûr, cette image est souillée par le péché, mais elle demeure présente en chacun. La vie, la mort et la résurrection du Christ ne se contentent pas de mettre le monde face à son péché et de le juger, elles exposent également l’étonnante étendue de l’amour de Dieu pour nous.
Nous vivons dans une époque qui a un besoin criant d’affirmation et d’acceptation. L’anxiété est l’esprit de notre époque et, de bien des manières, le mode par défaut de la ville. Nous constatons une épidémie de dépression et la croissance de désordres liés à la confiance en soi et à l’apparence personnelle. Le démarchage de plus en plus osé pour la chirurgie esthétique mise sur ces anxiétés d’une façon que nous n’aurions pu imaginer, il y a dix ans. Nous voyons encore une fois l’impossibilité de séparer les questions personnelles et les questions sociales : les démons de l’appât du gain et de la corruption tirent profit de l’insécurité des faibles et des vulnérables.
Voir la transformation opérée chez des amis, ma famille et des jeunes de mon Église, par la conversion au Christ, a été une joie profonde. Ce fil de l’affirmation personnelle a été vital dans le processus de transformation quand chacun a compris que l’événement central de l’histoire est profondément pertinent pour lui personnellement. En réfléchissant sur les menaces et les défis qu’il devait affronter, Martin Luther King a écrit : « Les moments atroces par lesquels je suis passé ces quelques dernières années m’ont également rapproché de Dieu. Plus que jamais, je suis convaincu de la réalité d’un Dieu personnel – une réalité vivante corroborée par les expériences de la vie de tous les jours. Dieu a été profondément réel pour moi au cours de ces dernières années. »[9]
Le dynamisme de la transformation et de l’espérance
Le salut est dynamique parce que son essence est la transformation et le changement. Nous croyons qu’un jour toutes choses seront restaurées, le monde sera jugé, toutes choses seront « réconciliées » et Dieu fera « toutes choses nouvelles » (Apocalypse 21.5).
Cette eschatologie est ce que nous cherchons à incarner ici et maintenant « car c’est en espérance que nous avons été sauvés » (Romains 8.24). Tom Wright l’exprime ainsi : « Alors la terre et le ciel seront un : c’est la note qui doit résonner comme une cloche claire et agréable dans toute vie chrétienne – des personnes appelées à vivre le présent à la lumière du futur. »[10]
L’espérance et le salut travaillent main dans la main. Nous espérons parce que nous croyons dans le salut de Dieu. Mais notre salut est mis en œuvre parce que nous espérons. En travaillant avec les sans-abri, j’ai découvert la raison de l’importance capitale de nourrir l’espérance : sa puissance de transformation. Une personne ne peut travailler à un avenir meilleur qu’une fois qu’elle croit qu’il existe. Comme Jim Wallis le dit souvent : « Espérer, c’est croire en dépit des évidences, puis observer le changement de l’évidence. »[11]
En réfléchissant aux expériences qu’il a faites en travaillant à soulager la pauvreté, Michael Taylor parle dans ses écrits de la dynamique qui existe entre l’espérance et la transformation : « En choisissant de croire que le monde a des possibilités, des possibilités apparaissent là où elles n’auraient pas pu apparaître autrement. C’est vrai de Dieu et c’est vrai de nous. En regardant comme prometteur le monde que nous connaissons, marqué par le chaos de l’insécurité, de la pauvreté et de l’injustice, et en agissant en conséquence, il se remplit de promesses. L’espérance est créative. Elle n’est pas le fruit de la transformation. La transformation est fille de l’espérance. Elle rend vertes les collines et croit que toutes choses peuvent être faites nouvelles. »[12]
En utilisant les catégories du salut étudiées ci-dessus, nous voyons cette dynamique de transformation et d’espérance par la puissance salvatrice de Dieu :
L’espérance est l’ingrédient-clé de la transformation. Elle fournit l’énergie dynamique qui est vitale pour combattre le négativisme et la peur qui peuvent engloutir des individus et des communautés dans le contexte urbain.
Conclusion : Aller plus loin
La critique que fait Jim Wallis d’un message de l’Évangile qui est sécularisé, individualisé, spiritualisé et renvoyé dans le futur est un défi lancé à la doctrine et à la pratique tant des évangéliques que des libéraux. Comme il l’a dit plus récemment : « Le message que le monde attend est celui d’un renouveau personnel accompagné d’une justice sociale. » Voilà la bonne nouvelle du salut qui peut être comprise dans le contexte urbain.
Notre créativité, notre énergie et notre confiance dans le message du salut seront essentielles si nous voulons le transmettre efficacement. Trop de personnes de nos institutions ecclésiales survivent en inhalant l’oxygène raréfié de la chrétienté. Nous vivons aujourd’hui à une autre époque et nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre que les gens viennent d’eux-mêmes à l’église et y prennent part s’ils ne peuvent voir que le message est lié à la vie réelle et l’intègre. Évangéliser est aujourd’hui une nécessité politique si on veut que l’Église soit, dans les zones urbaines, une présence qui transforme. Comme l’a écrit Steve Latham : « Nous avons besoin d’une religion authentique au lieu de la “religion décaféinée” de la tolérance libérale postmoderne. »[13]
Nous avons beaucoup à apprendre de la manière dont les Églises plus importantes de nos villes ont été capables de nourrir la foi, faciliter des amitiés, construire la communauté et accomplir un travail de haute qualité auprès des jeunes et des enfants. Cependant, les Églises plus importantes ne doivent pas perdre de vue leur rôle dans le corps du Christ et doivent éviter l’accumulation de ressources et les tendances individualistes et concentriques[14] auxquelles les grandes Églises sont enclines.
Les crises qu’affrontent nos communautés urbaines nous appellent à aller plus loin dans notre foi et notre témoignage : à rechercher une unité dans l’Évangile du royaume. En tant que porteurs de ce message et de ce style de vie, nous sommes appelés par elles à devenir une Église consacrée à « la mission comme transformation » : des lieux qui, dans le contexte urbain, parlent avec confiance de la plénitude, la libération, le pardon et l’affirmation que nous connaissons en Jésus.
Nous avons beaucoup à apprendre des parties du monde où l’Église grandit. Comme l’écrit Samuel : « La croissance explosive de l’Église en Inde est intimement liée à la découverte par les personnes pauvres d’Inde qu’on ne trouve pas en premier dans l’Évangile la relation personnelle avec un Dieu autrefois distant, mais la ressource de transformation des circonstances actuelles d’oppression et de pauvreté qu’ils connaissent par une expérience vivante de la puissance de l’Esprit Saint dans leur vie. »[15]
Steve Latham croit que « ce dont nous avons peut-être besoin c’est de la fusion entre les tendances libérales et charismatiques qui incarnerait tous les aspects de la réalité du royaume en tant que nouvelle création. »[16] C’est la synthèse puissante que Martin Luther King a conçue et représentée dans le mouvement des droits civils aux États-Unis. Et c’est ce dont j’ai entrevu des signes avant-coureurs à Peckham, il y a quelques semaines – une déclaration de l’espérance dans le salut de Dieu au sein de la complexité du contexte urbain. J’ai éprouvé un sentiment d’exaltation et de stimulation à y participer, signe certain de ce que le royaume de Dieu est à l’œuvre dans son monde.
Jon Kuhrt est le directeur de Community Mission, the Shaftesbury Society
Bibliographie
Bryant Myers Walking with the Poor [Marcher avec les pauvres] (Orbis Books/World Vision) 1999
Jim Wallis Agenda for Biblical People [Programme pour un peuple biblique] (Harper & Row) 1976
Steve Latham Some Issues in Urban Theology [Quelques questions sur la théologie urbaine] (London Urban Theology Project) 2007
Atkinson et al Dictionary of Christian Ethics and Pastoral Theology [Dictionnaire d’éthique chrétienne et de théologie pastorale] (IVP) 1995
Martin Luther King, Pèlerinage à la non-violence dans La force d’aimer (Casterman) 1968
Tom Wright Simply Christian [Chrétien tout simplement] (SPCK) 2006
Michael Taylor Poverty and Christianity [Pauvreté et christianisme] (SCM) 2002
Larry Rasmussen (ed.) Reinhold Niebuhr : Theologian of Public Life [Reinhold Niebuhr : Théologien de la vie publique] (Collins) 1989
Chris Sugden & Vinay Samuel Mission as Transformation [La mission comme outil de transformation] (Regnum) 1999
Chris Erskine Concentric Church [Église concentrique] (The Shaftesbury Society) 2003
Vinay Samuel Transforming our Cultures – A Gospel Agenda [Transformer nos cultures – un programme évangélique] (disponible sur www.wheaton.edu/HNGR/resources/vinay_samuel.html) 2006
Notes de fin
[1] Pour de plus amples renseignements se rendre sur www.peacealliance.org.uk
[2] Par exemple : Michée 3.5, Amos 7.10-17, Jérémie 6.13-15
[3] Jim Wallis Agenda for Biblical People (p. 93)
[4] L’impossibilité de séparer la personne de l’ordre social : tiré du diagramme 2-5, p. 48 dans Bryant Myers Walking with the Poor
[5] Transforming our Cultures – A Gospel Agenda Vinay Samuel (2006)
[6] Cette définition en quatre volets est tirée du Dictionary of Christian Ethics and Pastoral Theology
[7] Par exemple : Ésaïe 3.13-15 ; Jérémie 22.13-17 ; Amos 5.11-15 ; Michée 2.1-2
[8] Transforming our Cultures – A Gospel Agenda Vinay Samuel (2006)
[9] Martin Luther King, Pèlerinage à la non-violence extrait de La force d’aimer
[10] Tom Wright Simply Christian p. 186
[11] Jim Wallis (dans presque tous les discours qu’il a pu prononcer !)
[12] Michael Taylor Poverty and Christianity
[13] Steve Latham Some Issues in Urban Theology – l’expression « décaféinée » est une citation de Slavoj Zizek (London Urban Theology Project) 2007
[14] Concentric Church Chris Erskine (The Shaftesbury Society) 2003
[15] Transforming our Cultures – A Gospel Agenda Vinay Samuel (2006)
[16] Steve Latham, ibid.
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