Auteur : Pasteur Gary Simpson
Le 15 janvier 2006, à la veille du Martin Luther King Day, fête nationale américaine commémorant la vie et l’action du grand leader noir américain, le Pasteur Gary Simpson, de la Concord Baptist Church of Christ de New York, prenait la parole devant son Église et des coordinateurs nationaux du Défi Michée venant d’une quinzaine de pays. Voici un résumé et des extraits de son allocution.
Rappelant que la prière de Jésus en Jean 17 se situe dans le contexte d’une longue conversation avec ceux que Jésus appelle ses amis (Jean 13-15), le pasteur Simpson a rappelé que, dans cette prière en faveur de ses amis, Jésus place la barre très haut quand il s’agit d’unité et d’engagement. L’unité à laquelle nous sommes appelés est celle qui unit le Père et le Fils, entre lesquels il n’y a aucune discordance. Il ne s’agit donc pas de s’accommoder d’une unité partielle : « Si chaque Église est une en elle-même mais que nous sommes tous éparpillés, nous ne sommes pas encore parvenus à l’unité. Si nous qui sommes ici sommes un et que l’Église du bout de la rue est une, mais que nous ne pouvons supporter les gens de cette Église, alors nous ne sommes pas parvenus à l’unité pour laquelle Jésus prie. »
Il s’agit aussi de ne pas tomber dans le piège de vouloir enfermer les autres dans des catégories dont nous serions le point de référence arrogant.
L’exigence de l’unité n’est pas nombriliste. Elle vise la démonstration de l’amour du Père pour l’humanité. Jésus annonce que ses disciples feront des œuvres plus grandes encore que celles qu’il a accomplies, car : ’ Je ne demande pas que tu les retires du monde. » Les chrétiens ne sont pas appelés à fuir le monde mais à y rester pour agir et être des témoins. Nous sommes gardés en vue d’être mis à part (sanctifiés) pour servir le dessein glorieux du Père.
Cette action relève d’une part de rêve, rappelle le pasteur Simpson, le rêve de l’accomplissement de la justice de Dieu parmi les hommes, exprimé si puissamment dans le discours historique de Martin Luther King : « J’ai fait un rêve… ». Mais attention, rappelle le Pasteur Simpson, à ne pas se laisser dérober ce rêve par des usurpateurs du rêve, capables de détourner celui-ci à leur profit et même de le retourner contre ceux à qui il s’adresse en premier : les pauvres et les marginalisés, en les rendant responsables de leur propre malheur.
La grande force du Dr King fut aussi de ne pas enfermer sa lutte dans le seul cadre de la minorité noire, et lors de la grande marche de Washington, il y avait des gens de tous les groupes de population américains, noirs, blancs, indiens. Et de rappeler que « La pauvreté n’est pas un problème noir. La pauvreté est peut-être le seul problème au monde que nous pouvons tous connaître et auquel nous pouvons tous nous identifier. […] C’est la pauvreté qui se manifeste par de mauvais soins de santé. C’est la pauvreté qui se manifeste dans toutes sortes de maladies du cycle social, comme les maltraitances et les injures. C’est la pauvreté qui conduit les gens à l’économie « souterraine » parce qu’il n’y a pas d’espace dans un travail légitime pour des gens qui sont assez futés et assez doués mais qui n’ont pas eu la chance de trouver une occasion de le montrer. C’est la pauvreté qui mène à tant de destruction et à la destruction de nos communautés, ici et ailleurs. »
Le pasteur Simpson a poursuivi en exhortant ses auditeurs à réfléchir chacun à ce qu’il pourrait faire pour éradiquer la pauvreté. Rappelant avec force que les États-Unis sont le pays le plus réservé quand il s’agit de changer un style de vie entretenu en exploitant les plus pauvres, il a lancé un défi à son auditoire : « Dans le monde entier, ce pays est devenu le pire de tous les entremetteurs de pauvreté. Comment se fait-il que nous attendions ? Pourquoi hésitons-nous à […] monter en première ligne dans l’action pour éradiquer la pauvreté mondiale ? Il faut que nous soyons en première ligne, parce que nous sommes l’une des raisons principales [de cette pauvreté]. Les raisons, qui font que les nations riches deviennent toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, sont en grande partie dues à notre manière de vivre, vous et moi. »
Rappelant un article du New York Times qui affirmait qu’en 2006 le monde avait besoin de moins de discours et de plus d’action « parce que pendant que nous prononçons ces discours, cinq millions d’enfants supplémentaires meurent parce qu’ils n’ont pas eu assez à manger », il a poursuivi : « Pendant que nous prononçons tous ces beaux discours, une nouvelle maladie se répand de façon endémique dans un village que nous ne connaissons pas. Pendant que nous prononçons des discours, les gens se battent pour des miettes […] Qu’est-ce que le Seigneur demande de nous, si ce n’est « que nous pratiquions la justice, que nous aimions la miséricorde et que nous marchions humblement avec lui (Michée 6.8) ? »
Alors que faire sur un plan pratique ? Selon le Pasteur Simpson, une clé majeure pour les Noirs américains est l’éducation. « J’ai parlé avec un aumônier d’une des institutions carcérales de l’État. Je lui ai demandé : ‘Dis-moi, mon frère, que vois-tu, quelles sont les tendances ?’ Eh bien, c’est très simple, il n’a pas hésité, il a dit : ‘Les détenus sont de plus en plus jeunes et de plus en plus illettrés.’ Or je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais j’ai tout mis en branle en entendant cela ! >J’ai trouvé une solution, si nous pouvons apprendre à notre peuple à lire, peut-être leur éviterons-nous une condamnation à la prison. […] Nous devons travailler à cela, au fait qu’il y a parmi nous des gens qui ne savent pas lire. Et puisqu’ils ne peuvent pas lire, alors des entrepreneurs viennent chez eux, ils disent qu’ils vont réparer les toilettes et ils finissent pas enlever la maison. Ils ne peuvent pas lire, alors le concessionnaire automobile leur vend un tas de ferraille. Ils ne peuvent pas lire, alors ils obtiennent par la poste une carte de crédit approuvée à l’avance, ils l’enregistrent, elle a un taux d’intérêt de 0% et ils pensent qu’ils pourront l’utiliser leur vie entière et ils découvrent au bout de 6 mois qu’il monte à 23,5%. Nous devons résoudre le problème de la lecture mes amis. Nous devons lancer une campagne de lecture à grande échelle. Nous devons nous occuper de nos enfants, et pas seulement nos enfants, mais nos parents et nos grands-parents, pour les ramener à la lecture. »
Reprenant la prière de Jésus, le pasteur Simpson rappela que Jésus demande que sa joie soit rendue parfaite au travers de nous. En accomplissant sa volonté, en nous détournant de nos préoccupations nombrilistes, fût-ce pour une meilleure spiritualité, nous glorifions le Christ « non seulement dans le sanctuaire, mais aussi dans le monde » et ce faisant nous le remplissons de joie. À l’instar de Martin Luther King, il s’agit de sortir et agir, pour la gloire de Dieu, dont la joie est que « nous fassions sa volonté : que nous vivions dans ses projets, que nous fassions ce que Dieu nous a appelés à être, que nous vivions à la hauteur de notre responsabilité de créature. Vivre selon l’image Dieu, pour que vous et moi répondions à notre appel : rendre gloire à Dieu. C’est pour cela que Martin King a fait ce qu’il a fait : pour apporter à Dieu de la joie. […] Je sais qu’il m’est arrivé quelques fois de faire pleurer Dieu : en ne vivant pas à mon plein potentiel, en passant à côté d’occasions, en ne faisant pas ce à quoi Dieu m’a appelé. Mais j’ai découvert ceci : les larmes de Dieu peuvent être changées en joie si je décide tout simplement de le glorifier dès maintenant. Le glorifier dans ce que je fais. Le glorifier en tant qu’ambulancier volontaire. Le glorifier en faisant inscrire les gens sur les listes électorales. Le glorifier […] en donnant la main d’un bout du monde à l’autre, aux personnes qui travaillent contre la pauvreté. Quand nous osons même dire à notre propre gouvernement : « Vous vous trompez sur ce point, Monsieur le Président, sauf tout mon respect. Je respecte votre fonction, mais, sur ce point, vous faites fausse route. » Il me semble qu’un Dieu, qui s’est soucié de la détresse des pauvres, ne les abandonnerait pas une fois devenu président de la république. Un Dieu qui s’est inquiété de comment les gens vivent au jour le jour, un Dieu qui a dit : Je suis venu annoncer la bonne nouvelle aux pauvres.
« Ce n’est pas un rêve impossible ; ce ne serait un rêve impossible que si c’était nous qui l’avions dit. Mais ce n’est pas impossible, puisque c’est Jésus qui l’a dit. […] Ce n’est pas impossible, parce qu’avec Dieu tout est possible ».
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